Flyer Playtime

Playtime, le corps dans le décor – France

Exposition du 14 septembre au 9 novembre 2013 à La Graineterie à Houilles

Avec les artistes : Elvire Bonduelle, Lucien Hervé, Emese Miskolczi, Nathalie Regard, Cyrille Weiner

Flyer Playtime

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S’inspirant des regards de Jacques Tati et de Lucien Hervé sur l’urbanisme moderne international, l’exposition croise cinq univers artistiques qui interrogent l’espace construit. « Habiter, travailler, se divertir, circuler », quatre fonctions importantes de la ville, d’après les conclusions du CIAM reprises par Le Corbusier. Les liens qui se tissent entre l’espace aménagé et le corps sont ici explorés. La notion de décor, aussi présente, aborde ces lieux de vie par le biais de l’artifice. Une question semble émerger de cette pluralité de regards : qu’est-ce qu’habiter le monde ?

L’exposition Play Time a pour figures inspiratrices Lucien Hervé (1910-2007) et Jacques Tati (1907-1982), tous deux témoins et observateurs de l’émergence d’une architecture et d’un urbanisme moderne internationaux. Ces figures tutélaires sont les deux pôles entre lesquels dialoguent les autres artistes invités. Tous prennent pour fil rouge les liens qui se tissent dans la ville entre l’espace et le corps. Ils s’intéressent à l’espace construit, à la manière dont on l’habite et dont on le perçoit.

Unité d'habitation de Le Corbusier à Nantes

Unité d’habitation de Le Corbusier à Nantes © Lucien Hervé

La thématique du « corps dans le décor » oriente l’exposition sur les usages qui sont faits de l’espace construit, les comportements qu’elle favorise. La notion de décor se veut critique, notamment à travers le dialogue instauré entre Lucien Hervé et Cyrille Weiner et la sculpture-mobilier d’Elvire Bonduelle. Le décor évoque aussi une relecture distanciée des espaces par le biais de l’artifice (en lien avec la fabrication de la ville-décor Tativille par Jacques Tati) avec les travaux d’Emese Miskolczi et de Nathalie Regard. Au fil de sa découverte des œuvres, le visiteur éprouve sensiblement les desseins de l’architecture et de l’espace urbain comme cadres de vie, lieux de l’hospitalité et de l’expérience intime. Comment l’héritage de l’architecture moderniste est-il actuellement vécu et plus essentiellement, qu’est- ce qu’habiter le monde ?

En reprenant dans sa Chartes d’Athènes, les conclusions du CIAM (Congrès international d’architecture moderne crée en 1928), le Corbusier résumait ainsi le chantier social de l’architecture moderniste : «permettre l’épanouissement harmonieux de quatre grandes fonctions humaines dans la ville : habiter, travailler, se divertir et circuler ». Il est donc essentiellement question de penser le « Vivre ensemble » en réorganisant la vie collective dans la ville et les articulations entre espace public et privé.

L'Avenue Jenny à Nanterre

L’Avenue Jenny à Nanterre © Cyrille Weiner 2001

Une observation attentive et critique des usages des espaces urbains apparaît dans les travaux photographiques de Lucien Hervé et de Cyrille Weiner. Elle prend pour horizon l’utopie sociale. « Travailler, habiter, circuler, se divertir » sont des axes thématiques privilégiés pour mettre en perspective le regard qu’ils posent sur leur environnement. Un regard qui interroge subtilement la façon dont l’usager vit et se réapproprie la ville. Chez l’un comme chez l’autre, la planification urbaine est souvent présentée comme un laboratoire de comportements. C’est pourquoi la confrontation de leurs travaux construit un dialogue historiquement intéressant. Si Lucien Hervé (photographe attitré de Le Corbusier)  a contribué à diffuser les utopies de l’architecture moderne, porteuse de croyance dans le progrès, Cyrille Weiner en sonde les devenirs. Il interroge notamment son ambition de replacer l’individu au cœur de l’architecture…A force de tant de planification, n’en a-t-il pas été exclu ? S’il ne s’agit jamais pour le photographe de penser contre l’urbanisation, il l’observe toutefois du dehors. A la périphérie des villes, il explore des lieux où le tissu urbain est interrompu. « En observant le vivant à la marge, là où l’on ne l’attend plus, j’invite à penser différemment notre cadre de vie, notre manière d’habiter le monde » explique-t-il.

Moulures

Moulures © Elvire Bonduelle 2011

L’image du Lieu, c’est aussi celle du corps qui s’y installe. La question des usages qui sont faits d’une architecture par ses habitants conduit à s’interroger sur les notions de confort et d’hospitalité. A partir de quand le confort devient-il synonyme de conformisme ? Les sièges « moulures » d’Elvire Bonduelle soulèvent des interrogations relatives à la norme et au conformisme, à la liberté des attitudes et des usages. Sollicitant directement le corps, ils permettent aussi d’évoquer la question de l’hospitalité. L’hospitalité, cette notion clé du vivre ensemble, est également un sujet central du film Play Time.

Serie Metallos à Paris

Serie Metallos à Paris © Emese Miskolczi

Une fascination pour l’architecture comme structure spatiale nourrit les travaux d’Emese Miskolczi et de Nathalie Regard. L’architecture constitue le corps de l’œuvre, la charpente de l’image, comme elle a pu l’être pour Lucien Hervé adossant ses compositions aux structures des édifices photographiés pour développer une vision kaléidoscopique, à la limite de l’abstraction. Les effets de cadrages comme la sérialité permises par l’appareil photographie sont amplement sollicités par Lucien Hervé. L’oeil du photographe se déplace à l’intérieur de constructions complexes dont il extrait des fragments pour découvrir progressivement l’architecture d’ensemble. Sa lecture dynamique de l’espace architecturé en livre « une expérience plus profonde, à la fois physique et mentale. » Une ambition qui est aussi celle d’Emese Miskolczi et de Nathalie Regard. Leur regard à la fois analytique et contemplatif qu’elles développent sur des architectures industrielles compile, lui aussi, une succession de moments. Comme chez Lucien Hervé, l’appareil mécanique, (appareil photo ou caméra) se substitue à la vision naturelle pour « produire un effet supérieur à l’effet produit au naturel ».

Void

Void © Nathalie Regard 2005

Ces images chantiers rappellent aussi les nombreuses photographies de Lucien Hervé où les ouvriers s’inscrivent en harmonie dans les échafaudages des chantiers (elles-mêmes échos des Constructeurs de Fernand Léger). L’espace s’organise et se déploie autour des artistes qui le construisent et s’y mettent en scène. A partir des prises de vues de webcam la filmant dans son atelier pendant la réalisation du tableau Void, Nathalie Regard réalise un film d’animation et une série d’autoportraits. Ils mettent en abîme le travail dans l’atelier comme un espace de refuge et d’apaisement. Comme le rappelle Quentin Bajac  (ex directeur des collections photographiques du centre Georges Pompidou) : « On peut replacer le travail d’Hervé dans le contexte de la photographie moderne qui a beaucoup magnifié le travail. Qu’il s’agisse de François Kollar en France, de Rodchenko en Union Soviétique ou des photographes américains de l’époque du New Deal, le chantier est pour tous un endroit positif, porteur de valeurs de progrès. C’est un lieu vecteur d’utopie qui devient presque paisible. »

Téléchargement du Dossier de presse

Texte de Marguerite Pilven, commissaire d’exposition

L’’agence d’architecture et d’urbanisme rethink est partenaire de l’exposition.

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